mercredi 5 octobre 2016

La nuit je mens


Ces longues nuicts d’hyver, où la Lune ocieuse
Tourne si lentement son char tout à l’entour,
Où le coq si Tardif nous annonce le jour,
Où la nuict semble un an à l’ame soucieuse
Je fusse mort d’ennuy sans ta forme douteuse,
Qui vient par une feinte alleger mon amour,
Et faisant, toute nue, entre mes bras sejour,
Me pipe doucement d’une joye menteuse.
Vraye tu es farouche, & fiere en cruauté
De toy fausse on jouist en toute privauté.
Pres ton mort je m’endors, pres de luy je repose :
Rien ne m’est refusé. Le bon sommeil ainsi
Abuse par le faux mon amoureux souci.
S’abuser en amour n’est pas mauvaise chose.
Ronsard - Second Livre des Sonnets pour Hélène

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