lundi 19 octobre 2015

Danse avec un faune



« Les nymphes déshabillent la Nymphe pour le bain. Sur son tertre, le Faune s'intéresse. Il contemple. Sa présence n'est-elle pas nécessaire ? Ne fût-ce qu'au poème ? Il se mêle à la troupe virginale. Peu à peu, d'un œil qui ne saurait voir de face, une à une, les compagnes découvrent sa présence. C'est encore la panique ; et quel autre terme serait exact. Elles s'échappent de droite et de gauche, ce vol de cygnes, non de naïades se sauve, les jambes ployées, les mains vers leur fuite, à deux dimensions, courtes, allongées, sveltes pourtant et rapides avec l'aspect que donnent certains miroirs inégaux, ou mieux une eau mouvante. Le Faune et la Nymphe se trouvent seuls face à face. Entre eux la chaleur vacille. Ils se considèrent. La belle agreste et la bête charmante se mesurent. Ô Mallarmé ! Mallarmé si ému que vos mâchoires se crispent, voyez ce sublime point d'orgue à travers l'espace et le temps ! »

Jean Cocteau (Propos sur le ballet de Vaslav Nijinski L'Après-midi d'un faune sur la musique du Prélude à l'après-midi d'un faune de Claude Debussy s'inspirant lui-même du poème de Stéphane Mallarmé)

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